"SOUS TES YEUX LES POCHES SONT DES BASSINES"
1ère édition - mai 2025
2ème édition - septembre 2025
"SOUS TES YEUX LES POCHES SONT DES BASSINES"
1ère édition - mai 2025
2ème édition - septembre 2025
A KALEIDOSCOPE OF NOTHINGNESS
LE CYLURE
04 et 05 décembre 2025
TABLE BASSE RECORDS
LAUSANNE
04.12 : 21h
Dejan - soundy by Léon Jodry
Nadja Zela
Turbulences
https://www.youtube.com/watch?v=r1m_wowBbkk
https://nadjazela.bandcamp.com/
05.12 : 21h
Vivement la fin
Nonante
Dj Marcel
https://vivementlafin.bandcamp.com/album/hyper-vite
https://tablebasserecords.bandcamp.com/album/monate
04 et 05.12 : dès 18h
Aristide
Sakkadé
Méluzine
Colin Bottinelli
https://collectifaristide.ch/category/realisations
https://larakoull.com/sakkade-editions/
https://www.instagram.com/meluzine.zine/?hl=fr
https://colinbottinelli.ch/portfolio/
Prix Libre - Conseillé 10.- CHF
Un événement organisé par TABLE BASSE RECORDS et A KALEIDOSCOPE OF NOTHINGNESS
https://tablebasserecords.bandcamp.com/
The typewriter performance
Théâtre de l'ABC
A kaleidoscope of nothingness
with Lydia Lunch, James Johnston, Mathieu Amstutz, Kit Brown, Dejan
01 octobre 2014
… Je voulais écrire un texte manuscrit sur l’Histoire de l’imprimerie… Avec le verbe, il n’y a pas de commencement, imposé ou pas. Il n’y a pas d’origine du mot… c’est l’idée d’une empreinte… c’est la possibilité d’une trace…
…L’Histoire est une machine productrice d’amnésie… Les fêlures anciennes, les inconséquences des sociétés précédentes, l’infectieux balayage d’espoirs réduit en bouillie…
… Mais l’imprimerie, son processus et sa nécessité existent en dehors de l’Histoire, de son idée, de son concept frelaté…
…Dans 1984 de Georges Orwell, on s’acharne à imprimer un effacement perpétuel du passé, de son idée, de sa combustion présumée…
… L’imprimerie nous a amené la littérature et la propagande… des fois l’une et l’autre se chevauchent… la plupart du temps la première est le seul acte de résistance possible à la seconde…
… mais bien avant la sédentarisation, bien avant la religion, la presse écrite ou le livre de poche, ce lien tenace entre la main et l’oeil s’est développé… saisir quelque chose, le lancer… la conscience naissante d’une réalité non vécue, projetée, lointaine mais visible… l’idée d’être ailleurs en même temps qu’ici… une irrépressible envie d’ubiquité… sans la main qui lance, qui trace, qui saisit… pas de temps, pas de mémoire, pas d’histoire, sans l’oeil qui valide ses opérations… ! L’oeil est le canal des sens sur le flux ses possibles…
… les premiers mots étaient des peintures dans des cavernes…peindre le mot « image »… Est-ce que le mot « chose » désigne l’objet qu’il représente? … Quand les dessins s’effacent, quand les pigments perdent en intensité et se refondent dans la pierre qu’ils ornent… il fallait tenter de laisser une empreinte plus tenace et de creuser des sillons dans les matières… naissance du subconscient, il fallait creuser à l’envers afin de voir à l’endroit… mais l’inverse d’un inverse… comment fait l’oeil?
J’ai entendu parle d’un homme qui gravait dans un bout de bois le mot « négatif »… inversion hémisphérique de la perception… l’inverse d’un inverse…
sans l’oeil, sans la main… pas de temps, pas de mémoire, pas d’histoire…
il s’agit de se souvenir, d’expliquer, de laisser une trace… face à l’expérience vécue, face à la réalité envisagée… anamorphose… tout s’efface, tous s’épuise…
… il est 2h20 du matin, quelque part dans un sous-sol énorme… partout des gens s’activent autour d’un monstre d’acier… un méga Léviathan si effrayant qu’aucunes légende ne l’a jamais évoquée… un gigantesque corps de ferraille et de pistons… entre le poisson et le reptile… il émet un bruit tonitruant… Nous somme en plein siècle de folie productive, d’envie d’accélération… d’industrie naissante… le monstre d’acier a faim… ceux qui s’en occupent autour le gave de cellulose, de plomb, d’encre, d’huile… à l’inverse d’un corps humain, il transforme sa nourriture en un objet consultable, quotidien et périssable rapidement…
… le journal d’hier sera toujours plus bizarre que celui demain… la surinformation sera toujours plus efficace que la censure afin de produire de l’amnésie…
…dressage comportemental, agencement précis et méthodique des conversations, lavage de cerveau, numérisation du savoir… quand Dieu est mort, les prêtres deviennent reporter…
Histoire, archivage, stockage, mémoire… nous sommes des appareils d’enregistrements, des collecteurs d’informations, des disques durs dont la conscience a été externalisé…
… Nous sommes en 1454, la religion chrétienne invente le capitalisme… production de Bible en série… on impose l’idée d’un début et une explication possible du vide, de l’idée de son remplissage au travers des âges…
L’Histoire est une machine productrice d’amnésie…
… L’imprimerie nous a amené la littérature et la propagande… des fois l’une et l’autre se chevauchent… la plupart du temps la première est le seul acte de résistance possible à la seconde…
Combien de forêts l’humanité a-t-elle déjà gaspiller afin se satisfaire son besoin de faire sens ? Et pour quel résultat ?
Thanks for everything John
Souvenirs de la venue de John Giorno à La Chaux-de-Fonds. Pour une performance au LABO de l'ABC en décembre 2013. Quelle chance d'avoir pu ouvrir pour lui. Sans lui, rien n'aurait été possible. On lui doit tout... merci John... texte extrait de mon essai "No(w)body" !!
Le 7 décembre 2013 John Giorno arrive à La Chaux-de-Fonds par le train de Besançon, il est accompagné du poète et professeur à l’école d’art Michel Collet et il vient pour une performance au Centre de Culture ABC. On l’attend avec crainte et impatience avec Yvan Cuche, le directeur du théâtre.
L’homme est petit et magnétique, ses yeux semblent avoir vu l’humanité entière, son énergie est puissante, sa voix agréable et son humour plein de malice. Une vidéo du groupe R.E.M. rend hommage à ce visage, à ces yeux, à cet homme, ce poète rassembleur, ce sage tranquille. Un gros plan en noir et blanc sur le visage de John Giorno qui cligne des yeux, sourit, incline à peine la tête. La chanson s’appelle We all go back to where we belong… Giorno décède en 2019 et retourne là où il appartient, rejoignant certainement les poussières cosmiques laissées par les corps d’Andy Warhol et de William S. Burroughs, de Jack Kerouac ou d’Allen Ginsberg, tous ses anciens amants, tous ses anciens amis.
De Marcel Duchamp à Sonic Youth, de John Cage à Psychic TV, d’Andy Warhol à Patti Smith, de Lydia Lunch à Bob Dylan cet homme agit comme un liant silencieux d’une époque à une autre, d’une discipline artistique à une autre. Avec son label nommé le Giorno Poetry System il publie de nombreux albums qui fonctionnent comme un musée vivant de la culture alternative. Des morceaux inédits, des rencontres entre des poètes et des musiciens, des mots et des sons.
En sage tranquille, en rassembleur, en canalisateur énergétique, John Giorno aimante des artistes attirés par son idée du partage et les projets qu’il met en place célèbrent une poésie qui se doit d’être sonore, militante, mystique, publique et diffusée. En 1968 ils mettent en place avec William Burroughs une expérience poétique appelée Dial a Poem dans laquelle le public peut appeler une hotline et écouter un poème, un discours politique, des mantras bouddhistes ou de la poésie queer. Patti Smith, Meredith Monk, Laurie Henderson, Allen Ginsberg, mais aussi Bobby Seale, uns leaders des Black Panthers ou Amiri Baraka, le fondateur du Black Art Movements. À travers Dial a Poem la poésie redevient dangereuse pour la première fois depuis Antonin Artaud, le FBI met la pression sur Giorno et Burroughs et la ligne téléphonique est fermée en 1970.
Quarante trois ans plus tard à La Chaux-de-Fonds en 2013, John Giorno déclame ses odes à la vie et la mort, à la circularité éternelle, à la poésie réparatrice et libératrice.
Un long poème intitulé Thanks 4 Nothing cristallise tout le souffle vital de son travail, toutes les inspirations et les expirations, toutes les expériences cumulées, les sensations écoulées. Il espère que toutes les drogues qu’il a ingurgitées, que tout le chocolat qu’il a mangé, tout le vin qu’il a bu, tous les joints qu’il a fumés, tout le sexe qu’il a pratiqué viennent enivrer à leurs tours son audience, rendre les gens heureux, vivants, fluides. Il évoque les esprits de Burroughs, de Warhol, de tous les autres… il espère ainsi enclencher une partouze improbable dans ce petit théâtre de La Chaux-de-Fonds.
Une orgie joyeuse à laquelle les fantômes de Blaise Cendrars et de Karl Marx, des membres du Living Theater, Stefan Zweig ou Bakouhnine s’invitent spontanément. De l’émanation de la vie sur terre à sa vie à lui, il évoque et relativise l’aventure humaine, de son destin commun à la trajectoire individuelle de ses membres. Une même énergie entre le groupe et la particularité de chacun qu’il rassemble dans les projets du Giorno Poetry System.
Les mots sont des énergies qui émanent des corps, les corps des énergies éphémères coagulées qui jaillissent du vide. Face à l’immensité nébuleuse du cosmos et devant la circularité de l’Histoire, les individus sont des amas momentanés qui voient, qui crient, qui parlent, qui écoutent, qui partagent.
Pendant ses performances, seul avec ses mots qui s’échappent de lui, John Giorno répond à l’infini par un processus évanescent mais répétitif.
"Twenty billion years ago
in the primordial wisdom soup
beyond comprehension and indescribable
something without substance moved slightly
(...)
why did it happen
because something substance less
had feeling of missing something,
not
getting it
was not getting it"
John Giorno - Thanks 4 Nothing
INFRASENS ET CONTREBASSE