(photo : Kit Brown, 2011)
Cut-up ; "Less Home..." / "Embryonnaire"
L’homme s’avance mollement en
direction de leur aveuglement. Dans le même espace, une chose familière. Un air
dans le regard, une lueur passe… elle reste ! Cependant la folie plane
quelque part dans ces yeux qui me considèrent. L’éveil, elle se sent si loin de
tout ça. Ce regard qui réveille en moi une sensation de peur lointaine… Le
dégoût qu’elle suscite… eux !
Le Christ au milieu de la tempête… La
table que j’occupe m’évoque immédiatement quelques mouvements infinis, un
tourbillon frénétique de possédés et de possessions… je ne peux m’empêcher de
prendre une forme de roue en oscillation perpétuelle. L’écoulement furieux, le
psychédélisme ultime, avec plus de précision. Et c’est précisément sa
vitesse…la réalité se perd, la glace de la perception se brise nette. Enfuie
quant à elle…je connais indéniablement ces yeux, mais d’où ? Assise et de
marbre, religieusement prostrée, immobile… En plein élucubration de requin je
ne pensais pas, elle s’envole. De plus en plus, elle ressemble à ce peintre et
à ce Christ et je suis le responsable des relations publiques… On peut toujours
se tromper de religion. La non-acceptation, je l’ai bien compris, vous oblige à
résider dans ces perpétuels dehors. Le peintre et ses autoportraits les plus
prestigieux. Alors qu’il débite son baratin de masse effrayante d’individus
masqués, tantôt un squelette au travail ; burlesque ou tout vieux et
décoré avec un goût plus que douteux. Je ne sais pas quoi faire, donc elle est
son double, son sujet/objet. La réalisation de la perdition, c’est encore plus
grisant que les jeux vidéo.
Il y a des larmes maintenant.
Partout. Rouges. Ma mère mélangeant la sagesse orientale à la fluide lecture
d’Epicure. Purger l’âme de ses peurs, combattre ce siècle, son odeur de
ferraille et de charbon, mon rideau de larmes. Elle possède l’intensité d’un
drame perdant contact avec une nature honnie, oubliée, comme ça. Le sergent
débarque sans prévenir, j’ai à peine le temps du 20ème. Ces
philosophes errants, ses monologues à la complexité délirante. Je baille
ostensiblement, m’exile dans l’opium en Afrique, je lui demande conseil. Je lui
dis que tout n’est que réécriture, démence. Le siècle du devenir oriental
aussi… On a a absolument aucune chance de s’en tirer. De cette façon ou dans
les inconsistances de l’histoire… Machine ontologique, il est dans une belle
merde. Il me croit insomniaque alcoolique, fou errant, l’ultime recours est de
me bourrer de coup. Il s’acharne à la production outrancière… Les nations laissent
le choix de lui faire exploser la tête, je corrobore dans leurs inutilités. Le
tintamarre de la manette. J’ai de nouveau l’évasion. Elle m’excite, un filet de
bave. Une semi-érection. Plus triste et décomposée qu’auparavant. Je trouve que
ça a l’air plus bizarre que d’habitude.
Les dents trouée je tente d’appeler
le Dr. Emette Elroy. Encore une âpre rugosité… Les yeux inexpressifs d’un
chien. Je désespère complètement. Je me dirige, blême, des poches enflée sous
les orbites… Les lumières préfigurent une chute lente, sombres parties visibles
de sa peau… Comme un rêve, ou pas, une autre voie, un chemin, une bifurcation.
Pire, des saillis en excroissance… Impossible dans les couloirs de mon
immeuble, apeuré, peu importe. La jungle est épaisse, parfaitement modélisée.
Un tableau de Soutine. Une nature morte représentant l’humus humide et suintant
qui se dégage de ce regard vivant, dont la nature intrinsèque a péri…
Rachitique, je sais que l’ennemi est partout, tout autour de moi… Comme des
milliers d’autres, partout dans des cavernes, très laid, sur tous les trottoirs
de toutes les villes. Les cris gutturaux des valeureux citoyens des rues.
Comment étaient leurs vies sanguinaires ? Je meurs encore de leur
espérance de vie.
C’est un hôtel comme il y en a mille,
c’est un hôtel stupide et abstrait. Votre vie rampante, de sortie. C’est un
hôtel dont la chambre 25 de vos années tremblantes. Vous vivez dans la
réception. Tout semble vieux. Pourtant, tout a été si bien agencé, qu’il fallait
une suite. Je l’ai construite. Ils vous inventent des besoins… Vous êtes des
sens. Heureusement, mais encore chaud, dans un bon lit… Peut-être avez-vous
satisfait l’imagination. Est-ce maintenant qu’ils vont commencer la
société ? Vous vous sentez exister… Peut-être très doucement au début.
Forcément, pour qu’une retranscription soit possible. Les mots ne sont plus mon
travail, alors ils deviennent une juxtaposition de non-sens, un agglomérat de
particules. Tout a été fait très précipitamment… Il y a un faussé entre ce
qu’elle entend et ce qui était la solution. J’ai perdu beaucoup de temps avec
ma boite charnelle, peut-être parle-t-elle simplement. Il est devenu évident
qu’ils sont seuls à comprendre cet idiome-là. L’aphasie, cela ne pouvait
qu’aboutir à une catastrophe.
La fixité de son point de vue, tout
cela n’ait qu’un océan de normalité, d’après lui. Tout peut reposer sur l’asphalte, les choses ont des tendances.
Les incohérences sont effacées. La concordance laide, malade, boitillant sur un
ridicule moignon simple. Il suffit d’éliminer les premières mains. Les pigeons
roucoulent, ils avancent stupidement, tâtent le trottoir, le désordre est
garanti. Tout sera repris en main, et tout sera enlaidit par plusieurs
protubérances dégoutantes. Et lui, Vincent, peut accomplir sa destinée. Les
oiseaux sont les seules bestioles ayant réglés le problème.
"Embryonnaire" de Yonni Chapatte et "Less Home..." de Dejan sont en vente dans les libraires suivantes :
La Méridienne et L'Entre-Deux (La Chaux-de-Fonds) et Le Cabinet d'Amateur (Neuchâtel)